Ce superbe complexe (incluant un hammam, une medersa, un türbe ainsi qu'une magnifique fontaine rajoutée en 1732 par Mahmud I, fut construit entre 1580 et 1587 ; Ce sera l'un des derniers projets d'envergure entrepris, à plus de 90 ans, par le grand Mimar Sinan.
Si la renommée de cet ensemble somptueux, digne d'un membre de la famille régnante, est due en partie à son concepteur, elle l'est tout autant par l'origine de son commanditaire, Giovanni Dionigi Galeni, un Italien, né pauvre en 1519 dans un petit village de Calabre !
Enlevé à l'âge de 16 ans par l'Amiral de la régence d'Alger (Etat sous contrôle ottoman), il est enrôlé de force dans le vaisseau de ce dernier. Ali Paşa (ou Pasha) entame alors une carrière fulgurante qui le voit devenir l'un des plus importants corsaires de la régence, puis Gouverneur de Tripoli. A son tour Beylerbey (Gouverneur de la régence) d'Alger, poste qu'il détient pendant une dizaine d'année, il devient, de 1572 jusqu'à sa mort en 1587, Grand amiral de la flotte ottomane.
Converti de longue date à l'Islam et considérablement riche, il décide d'édifier cet impressionnant complexe (külliye) sur un terrain qu'il possède au bord du Bosphore dans le quartier de Tophane, à proximité de l'Arsenal (aujourd'hui disparu) et d'une fabrique à canon fondée par Mehmet II le Conquérant au 15e siècle, toujours visible et qui abrite de temps à autre des expositions temporaires.
L'architecture de la mosquée, avec sa coupole centrale flanquée de deux demi-coupoles et "soutenue" par quatre inhabituels contreforts, dégage de fortes similitudes avec Sainte-Sophie. L'intérieur, bordé par deux galeries à l'étage est baigné de lumière. Au fond, le minhrab est recouvert de magnifiques carreaux d'Iznik.
Comme le veut l'étiquette, la mosquée ne possède qu'un seul minaret ; en avoir deux ou plus n'était permis qu'aux sultans et aux membres de leur famille...
Enfin, quant à la légende qui veut que Miguel Cervantès, l'auteur de Don Quichotte de la Manche, effectivement captif des Maures à Alger, aurait travaillé comme "esclave" sur le chantier de cette mosquée ... eh bien ! ... ce n'est probablement qu’une légende ! :)
